J’ai obtenu des Ivoiriens de dormir chez eux pour ma dernière nuit.
Ils sont venus en délégation palabrer avec le Libérien qui détenait mon passeport. Le patron des douanes ivoiriennes a été parfait : Bonjour, ça va ? La famille, ça va ? On le prend sous notre protection ce soir. Il n’y pas de problème ? (de longues minutes s’écoulent) Et chez vous ça va ? Nous tenons à vous remercier (je serre les poings) Donc il va venir avec nous. Il n’y a pas de problème ? (minutes de silence rompues par « non il n’y a pas de problème » mais il ne donne pas le passeport) Bon il fait chaud aujourd’hui… On va le prendre chez nous ce soir et demain il pourra partir. Il n’y pas de problème ?
Finalement l’autre donne à regret mon passeport à l’adjudant qui me le tend aussitôt « Alain va vous remercier »
Je me lève et lance à l’adjudant « vous l’avez déjà fait vous-même » C’était au-dessus de mes forces.
Parce que pendant 5 jours, ils m’ont traité comme une bête, ne me donnant ni eau ni nourriture ni toilettes ni douche… Il a fallu l’intervention des Ivoiriens pour qu’ils cessent de me chercher des noises. Tout ça pour ce poivrot qui n’a pas fait son travail !
Je rentre, en voiture, en Côte d’Ivoire. Accueilli avec sympathie.
J’assiste au retour du marché.
Globalement les Ivoiriens ont tout sauf de l’alcool frelaté et les Libériens n’ont pas grand-chose. Donc le vendredi étant jour de marché à Gbinta ou Gbeunta.
Donc les Libériens passent avec des bidons d’alcool
Et reviennent avec tout un tas de choses, des peaux de zébu
Des chaussures
Et des quantités invraisemblables de nourriture…
Pendant ce temps-là, Claver continue mon instruction culinaire :
La Garba est de l’Attiéké avec du thon et une sauce… au piment
Le Bandji est le nom du vin de palme en Côte d’Ivoire
Le café Baoulé ou café des pauvres ou des étudiants : eau froide sucrée dans laquelle n trempe une tartine de pain
Mais ce qui m’a fait le plus rire, car ça résume l’humour africain, c’est le « Blissitebil » !
C’est le nom d’un artiste Ivoirien qui, en désaccord avec le gouvernement, a entamé une grève de la faim. N’y tenant plus, il a mangé en cachette une banane braisée accompagnée d’une sauce arachide. Mais il s’est fair surprendre ! Depuis tout le monde appelle ce plat un « Blissitebil !!!
J’apprends que « saigner du nez » veut dire avoir sa braguette ouverte !!!
Dernière soirée. Olivier, l’officier de santé, m’offre de partager son repas.
Riz et poisson avec de la sauce pimenté. J’ai apporté l’attiéké que Claver m’a offert.
J’offre deux bouteilles de vin que l’ensemble de la douane et moi allons boire dans un café du village
A cette occasion, Claver me fait découvrir la « Drogba » du nom de Didier Drogba, l’ancien joueur de foot Ivoirien très populaire ici
« La bière Bock est aussi populaire que Drogba, alors on l’appelle comme ça » Et d’ajouter, malicieux « mais elle est beaucoup moins chère que lui ! »
Au nom de toute la brigade, l’adjudant m’offre une bouteille de vin ivoirien, le Valpierre, produit par Kiravi.
Je suis ému par le geste. Par le goût, moins…
On m’offre de mettre mon matelas dans la salle de soin…
Demain, la liberté…